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Un bel article des Nouvelles Calédoniennes pour les 40 ans de Do Kamo

 

 

A.-C.P. | Crée le 31.08.2019 à 04h25 | Mis à jour le 31.08.2019 à 04h25

 

Une photo du personnel du lycée Do Kamo, en 1984.Photo Do Kamo

Vallée-des-Colons. Do Kamo, c’est une partie de l’histoire de la Nouvelle-Calédonie. Le lycée s’inscrit dans la volonté de l’Eglise protestante de former des cadres mélanésiens. Il accueille aussi des élèves en échec scolaire que la structure essaie de remettre sur la voie de la réussite.

«C e n’est pas que l’anniversaire du lycée Do Kamo, c’est l’occasion de se replonger dans l’histoire de la Nouvelle-Calédonie, au moment où elle se cherche un avenir politique et culturel », introduit Kaemo Var Höcë, pasteur et président de l’EPKNC, Eglise protestante de Kanaky Nouvelle-Calédonie. Car la raison originelle d’être de l’établissement scolaire, géré par l’Asee, Alliance scolaire de l’Eglise évangélique, est la formation de cadres kanak (lire par ailleurs), pour laquelle il a été précurseur. « Beaucoup sont passés par Do Kamo, le seul lycée de l’Asee, le fleuron », témoigne Henri Lalié, qui y est professeur d’histoire, depuis 2008. Marianne Hnyeikone y enseigne les langues et cultures kanak depuis vingt-six ans. « Il y en a partout, dans tous les domaines, des PDG, comme celui de la SLN, des maires, des experts-comptables, des chanteurs, etc. »

Une autre pédagogie

A ses débuts, la pédagogie à Do Kamo se distingue de celle des autres établissements, estime Henri Lalié, car elle a davantage de latitude. « On a par exemple été les premiers à mettre en place les études, il y a une trentaine d’années. » Et être professeur à Do Kamo représente une expérience à part, estime Marianne Hnyeikone, « pur produit du Lapérouse », comme elle se définit. « C’est différent. Je pensais utiliser la pédagogie moderne, mais ça ne marche pas. Je fais maintenant selon la façon traditionnelle, comme dans nos cases. C’est moins magistral, il y a moins de froideur. Et ça fonctionne. Surtout, on se rend compte qu’ils arrivent mieux à accéder au savoir scientifique. » La vie au sein de l’établissement a évolué en même temps que celle de la société. « Les élèves ne sont plus les mêmes, et il faut que Do Kamo innove, insiste Henri Lalié. Le lycée doit continuer à influer dans la vie de la Calédonie. On voit comment ça se passe aujourd’hui, mais c’est un travail global à mener. » Le message n’est pas évident à faire passer aux jeunes. « Beaucoup ne se rendent pas compte de cette histoire, de cet héritage », note Marianne Hnyeikone.

Le lycée de la dernière chance

L’autre caractéristique de Do Kamo réside dans sa forte dimension sociale. « On accueille beaucoup d’élèves qui sont refusés ailleurs, indique Henri Lalié, et on les fait réussir. L’ambiance a un côté familial et traditionnel. C’est un peu le lycée de la troisième ou de la quatrième chance. » Il est un de ceux qui accueillent le plus de jeunes boursiers, en difficulté scolaire, refusés dans les autres établissements, exclus ou incarcérés au Camp-Est. « On doit composer avec ça, mais c’est une fierté, témoigne Daniel Collet, responsable du CDI, depuis 2006. On est identifié comme un lycée de kanak, et ce n’est pas valorisant pour les autres, mais ça l’est pour nous, car on aide des jeunes à grimper l’échelle sociale. » Via notamment un tutorat d’excellence et la préparation à Sciences Po. Destiné au départ aux jeunes des Îles et de la Brousse, Do Kamo reçoit, aujourd’hui, environ un tiers d’élèves issus des collèges du Grand Nouméa. « Et c’est un lycée qui a une identité forte, qui valorise la culture kanak », ajoute Daniel Collet. Il est le seul à proposer quatre langues kanak au baccalauréat, drehu, nengone, a’jïë et paîci. La gageure ? Continuer à faire vivre l’ambition première, celle de former les jeunes du pays.

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La vie de Do Kamo commence avant 1979. Son ancêtre sur le site est un foyer indigène protestant, créé en 1949. « Le terrain a été acheté par deux pasteurs qui voulaient rassembler les paroissiens, raconte Henri Lalié, professeur d’histoire au lycée Do Kamo. Le foyer hébergeait ceux qui venaient des Îles et de Brousse, et servait aux activités de l’église. » Une partie du foyer devient une petite école primaire jusqu’en 1967. « Les écoles nouméennes n’accueillaient pas tout le monde », poursuit Henri Lalié. Parmi les élèves qui l’ont fréquentée ? Jacques Iekawe, Fote Trolue, Dick Ukeiwe, etc. En 1961, la construction d’un bâtiment en dur, qui sera démoli en 1994, commence. Il accueille les jeunes travailleurs. Le site devient le premier internat de garçons mélanésiens scolarisés au lycée Lapérouse, jusqu’en 1975, avant que les locaux ne soient prêtés à la Ddec, en 1976 et 1977. En 1978, c’est à nouveau un internat pour les élèves de Havila et de Do Neva qui sont en seconde à Blaise-Pascal, à l’image d’Henri Lalié.

Le premier établissement secondaire de l’Asee

En 1979, l’Eglise protestante se prononce en faveur de l’indépendance et prend position pour la formation de cadres mélanésiens. Le lycée, qui sera baptisé Do Kamo, en 1980, ouvre. Cinquante-quatre élèves de seconde et quatre professeurs font leur rentrée. Une réalisation qui s’inscrit dans le contexte politique régional et local. « Dans les années 1970, le Pacifique subit une phase de décolonisation après l’Asie et l’Afrique, avec Fidji, Salomon, Papouasie-Nouvelle-Guinée, etc., des jeunes reviennent de Métropole après leurs études et commencent à parler d’indépendance. Il y a une bipolarisation politique, et le front indépendantiste se crée. »

La première décennie de vie de l’établissement est marquée par un engagement fort pour la cause de l’enseignement des jeunes Kanak. Do Kamo subit un attentat à la bombe, en mai 1985, et une attaque par une milice loyaliste, en 1986. Le lycée professionnel ouvre, en 1989, et le drehu et l’a’jië sont enseignés à partir de l’année suivante. En 1991, ouvre la seconde adaptée et les ateliers bibliques apparaissent. En 1996, le contrat d’association avec l’Etat est signé. De nouveaux bâtiments sont construits et de nouvelles filières naissent.

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560 élèves fréquentent le lycée Do Kamo. Il se trouve rue Taragnat, sur un terrain de 52 ares acheté 1,3 million de francs par l’Eglise protestante, en 1948.

2 réponses
  1. avatar
    Andrée Waïnangö KAZO dit :

    Bonjour et bon anniversaire au Lycée Do Kamo (40 ans)
    Tout d’abord, un grand merci à toutes ces personnes de bonnes volontés et de détermination dans cette initiative de vouloir créer un lieu d’émancipation de notre peuple. Respect et hommage à tous ces hommes pleins de foi et de coeur, tous ces pasteurs venant d’ailleurs et nos anciens, qui ont défié le Seigneur, par leur croyance. C’est pour cela, qu’il faut toujours faire une place à l’instruction religieuse dans l’établissement, Nos coutumes kanaks, dont nous prônons les valeurs de respect et d’humilité, ont été fondées à partir de la Bible apportée par les premiers missionnaires. Si on met en avant cette instruction, on pourra peut-être redonner du sens à notre Education Sociétale.
    Bonne continuation et longue vie au Lycée Do Kamo parce que Dieu est toujours avec toi, grâce à tes fondateurs, qui ont cru en lui, et, en qui nous devons toujours croire.
    A toute l’équipe éducative, bon courage et bonne continuation

  2. avatar
    Cassiat Gérard dit :

    Bon anniversaire!
    Je vous suis très régulièrement par internet, car les années du début de Do Kamo et les aides au devoir dans les années 2010 m’ont fortement marquées. Longue vie au lycée malgré les soucis de l’ASEE.
    Amitiés à tous ceux que je connais
    Gérard

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